Imaginez : vous recevez un SMS vous avertissant qu’une opération suspecte a été détectée sur votre compte bancaire. Inquiet, vous cliquez. En moins de deux minutes, vos identifiants sont volés. Et votre compte est vidé. Ce scénario, de plus en plus courant, porte un nom : le smishing.
Derrière ce terme un peu étrange se cache une menace bien réelle d’escroquerie téléphonique, en forte croissance en France. Ces dernières semaines, les alertes se multiplient. Et pour cause : les escrocs redoublent de créativité pour vous tromper via de simples messages texte. Alors, de quoi s’agit-il exactement ? Pourquoi cette arnaque est-elle si efficace ? Et surtout, comment ne pas tomber dans le piège ?
Sommaire
Une technique d’arnaque qui surfe sur nos habitudes
Vous l’avez sans doute déjà remarqué : tout passe aujourd’hui par notre téléphone. Notifications bancaires, livraisons de colis, rappels de rendez-vous médicaux… Le SMS est devenu un canal de communication courant, presque anodin. Et c’est justement ce qui en fait une cible idéale pour les escrocs.
Le smishing, contraction de « SMS » et « phishing », consiste à envoyer un message frauduleux imitant parfaitement ceux envoyés par des entités officielles : banque, impôts, assurance maladie, opérateur mobile ou encore service de livraison. Le but est simple : vous inciter à cliquer sur un lien ou à rappeler un numéro, pour ensuite voler vos données personnelles ou bancaires.
On pourrait croire qu’il suffit de faire attention pour éviter l’arnaque. Mais la vérité, c’est que ces messages sont de plus en plus crédibles. Ils sont courts, vont droit au but, et surtout, ils jouent sur l’émotion : stress, urgence, panique. Tout est fait pour que vous réagissiez vite… et sans réfléchir.

Une arnaque bien rodée, souvent difficile à repérer
Le message peut évoquer un paiement non autorisé, un colis bloqué ou une mise à jour urgente de vos informations personnelles. Parfois, il vous redirige vers un faux site Internet qui ressemble trait pour trait à celui de votre banque ou d’un organisme officiel. Parfois encore, il vous demande simplement de rappeler un numéro pour « vérifier une opération ». Ce genre de technique, très proche du ping call ou du vishing (arnaque par appel vocal, que nous avions déjà évoquée), repose sur un même principe : l’usurpation d’identité.
Et dans le feu de l’action, même les plus prudents peuvent se faire avoir. Il suffit d’un moment d’inattention, d’un clic malheureux.
Car sur un smartphone, tout va très vite : les liens sont raccourcis, les numéros masqués, et l’interface souvent peu lisible. Pas toujours facile, dans ces conditions, de distinguer un vrai message d’une tentative d’escroquerie bien ficelée.
L’arnaque au colis : le piège qui tombe parfois au « bon » moment
Parmi les formes les plus fréquentes de smishing, il y a celle qui cible les livraisons de colis. Vous recevez un SMS signé La Poste, DPD, Amazon, Mondial Relay, FedEx ou UPS, vous informant qu’un colis est en attente de livraison. Mais pour le recevoir, il faut régler des « frais de port » ou « de dédouanement » via un lien fourni dans le message.
À première vue, cela peut sembler suspect… sauf si vous attendez justement un colis. Et c’est là que le piège se referme.
Ce type d’arnaque repose sur le hasard et le volume. Le taux de réussite est faible, certes. Mais comme ces messages sont envoyés par milliers, il y aura toujours quelques personnes qui reçoivent le SMS pile au moment où elles attendent une livraison. Et dans le doute, sous la pression de ne pas rater leur colis, beaucoup cliquent sans réfléchir.
Même ceux qui n’attendent rien peuvent se faire avoir. Par curiosité. Parce qu’un colis inattendu, c’est intrigant. Un cadeau surprise ? Une commande oubliée ? C’est parfois suffisant pour susciter un clic.
Une fois sur le faux site, tout est bien imité : le logo, les couleurs, les mentions légales. Et l’on vous demande gentiment vos coordonnées bancaires pour payer 1,99 € de « frais ». En réalité, ce n’est qu’un prétexte pour vous soutirer vos informations bancaires.
Alors, si vous recevez un tel message, posez-vous toujours cette question simple : est-ce que j’attends réellement un colis ? Et de ce transporteur-là ? Si la réponse est non, effacez-le. Si vous avez un doute, allez vérifier par vous-même sur le site officiel du transporteur, sans passer par le lien du SMS.

Pourquoi le smishing prend autant d’ampleur aujourd’hui ?
C’est un phénomène que les experts de la cybersécurité observent depuis plusieurs années. Mais depuis 2024, la courbe des attaques explose. Selon plusieurs rapports, les campagnes de smishing sont désormais aussi fréquentes – voire plus – que celles par e-mail.
Pourquoi cette explosion ? D’abord parce que les SMS échappent encore à de nombreux filtres anti-spam. Ensuite, parce que les gens se méfient des e-mails, mais pas encore suffisamment des textos. Et puis, il y a la simplicité : pour un escroc, envoyer des centaines de SMS frauduleux ne demande que quelques outils peu coûteux.
Enfin, il ne faut pas oublier un facteur clé : le téléphone est devenu le coffre-fort de notre vie numérique. Nos applications bancaires, nos mots de passe, nos réseaux sociaux, nos informations personnelles… Tout est là. Un seul SMS peut suffire à y accéder.

Les conséquences peuvent être lourdes
Un simple clic, et c’est toute votre vie numérique qui peut basculer. L’escroc peut vider votre compte, pirater vos accès ou encore revendre vos données sur des plateformes clandestines.
Pire encore : certaines attaques installent un logiciel malveillant sur votre téléphone, capable de surveiller vos activités à distance. Il intercepte vos codes de vérification, envoie des messages à votre insu, voire utilise votre ligne pour appeler d’autres victimes.
Et tout cela peut se faire en quelques minutes, sans que vous vous en rendiez compte.
Comment éviter de tomber dans le piège ?
Il n’existe pas de recette miracle, mais adopter quelques bons réflexes peut faire toute la différence.
Avant tout, gardez cette règle en tête : aucune banque, aucun service public, aucun opérateur ne vous demandera jamais vos codes par SMS. Jamais.
Si vous recevez un message suspect :
- Vérifiez le numéro de l’expéditeur et méfiez vous s’il s’agit d’un numéro avec un indicatif téléphonique inconnu comme +355, +374, +385, +36, +373…
- Ne cliquez pas sur le lien. Connectez-vous vous-même à votre espace personnel via l’application ou le site officiel.
- Ne rappelez pas un numéro inconnu. Appelez directement le service concerné à partir des coordonnées disponibles sur son site.
- Signalez le message au 33700, la plateforme officielle de signalement des SMS frauduleux.
- Et surtout, ne cédez pas à la panique. Ces messages sont conçus pour vous faire réagir dans l’urgence. Prenez quelques secondes pour réfléchir. Cela peut suffire à éviter le piège.
Si vous avez déjà cliqué, il n’est pas trop tard
La première chose à faire est de ne rien remplir sur le site vers lequel vous avez été redirigé. Fermez immédiatement la page. Ensuite, changez vos mots de passe, notamment ceux de vos comptes sensibles. Et si vous avez fourni des informations bancaires, contactez votre banque au plus vite pour faire opposition.
Pensez aussi à faire un scan de votre téléphone à l’aide d’une application de sécurité fiable, surtout si vous avez téléchargé un fichier ou une application à partir du lien.
Enfin, conservez toutes les preuves : captures d’écran du message, de l’URL, des échanges éventuels. Elles pourront vous être utiles si vous devez déposer plainte.
Le smishing est là pour durer. À nous d’apprendre à le déjouer !
Ce n’est pas un phénomène passager. Comme le phishing ou le vishing, le smishing s’inscrit dans un paysage de cybermenaces de plus en plus complexes. Les escrocs s’adaptent à nos usages, à nos habitudes, à notre quotidien. Et ils continueront à le faire.
Mais la bonne nouvelle, c’est que la meilleure arme reste l’information. Plus nous sommes conscients des risques, plus nous savons repérer les signaux d’alerte, moins ces arnaques font de victimes.
Alors, la prochaine fois que vous recevez un SMS inquiétant, prenez un instant. Lisez-le attentivement. Posez-vous les bonnes questions. Et souvenez-vous : si cela vous semble trop urgent, trop flou ou trop inquiétant pour être vrai… c’est sûrement une arnaque.






