Depuis la démocratisation du poker au cours du 19ème siècle, les liens qui unissent le jeu de cartes au monde de la finance sont réels. Le cinéma s’est d’ailleurs emparé de cet état de fait pour faire apparaître les connections entre ces deux domaines. Souvent de façon caricaturale en utilisant des parties de Texas Hold’em entre traders ou des petits génies du poker font l’étalage de leurs compétences relevant du fantasme sur des disciplines mathématiques comme le calcul de probabilités ou l’analyse de courbes presque divinatoires d’indices boursiers.
Des compétences indispensables presque identiques pour briller
Pourtant, la comparaison est valable sans l’ajout des chimères liées au septième art. Certaines grandes universités américaines comme la prestigieuse Massachusetts Institute of Technology (MIT) ont d’ailleurs théorisé les liens existants au travers de la « théorie des jeux ».
De notre côté, nous pensons qu’il suffit tout d’abord de s’intéresser aux compétences et qualités nécessaires pour évoluer durablement dans ces deux mondes. Stratégie, émotions, management, sens du risque, prises de décision, analyse des gens, patience, sang-froid, résilience ou encore vision à grande échelle.
La liste est longue et nous pourrions développer celle-ci pendant des heures. Ces qualités à avoir ne sont bien évidemment pas figées dans le temps. Le développement des nouvelles technologies sur le dernier quart de siècle a fondamentalement bousculé la donne pour ces deux domaines et notamment internet ou l’informatique. Acheter des actions boursières en ligne est devenu un jeu d’enfant pour les néophytes, tandis que l’accès à l’information (souvent gratuite) proposée par les meilleurs analystes financiers de la planète s’est démocratisé. Investir sur des sociétés comme Tesla ou AirBnB avant que leurs cours ne s’envolent n’est plus un miracle pour les investisseurs débutants.
C’est la même chose pour notre jeu de cartes préféré. Le poker en ligne est devenu la norme et a participé au boom de la discipline au début des années 2000. C’est d’ailleurs grâce à l’histoire formidable de Chris Moneymaker, adepte du poker en ligne et champion du monde en 2003 (2,5 millions de dollars de gain), que l’on doit la pokermania qui perdure encore aujourd’hui. Le web a aussi favorisé l’attrait des joueurs pour des variantes méconnues comme le Omaha Hi-Lo ou le Stud. De plus, le web a également facilité l’assimilation du poker avec des cours en ligne ou des rappels permanents de certaines mains et autres puissantes combinaisons à adopter pour s’assurer de mettre toutes les chances de son côté. Incontestablement, l’évolution a également été fondamentale à ce sujet.
À la table ou derrière leur écran, pros et traders fonctionnent de la même manière
Une mise en situation est souvent plus parlante. Lors d’un tournoi ou d’une partie, les mécaniques du joueur de poker peuvent le rapprocher de certains acteurs du monde de la finance.
Lorsqu’il gère son nombre de jetons ou sa bankroll, le rapprochement peut être fait avec le financier qui doit administrer son portefeuille d’actions et d’investissements. Idem avec les relations avec les autres personnes à la table qui oscillent entre négociations, compréhension des émotions et bluffs. Jouer sur l’affect ou comprendre comment fonctionnent intellectuellement ses interlocuteurs est l’une des bases du monde économique, peu importe l’objectif : vendre, acheter, se créer un réseau…
Enfin, c’est sur un dernier point qu’il est essentiel d’aborder, le sang-froid. Celui-ci est indispensable dans toutes les activités à grandes pressions. Lorsqu’un joueur doit engager ses chances de victoire sur un coup à tapis, sa maitrise émotionnelle pour prendre la meilleure décision doit être à son maximal. On peut ici y voir une comparaison naturelle avec le trader qui engage des sommes importantes sur une prise de risque calculée.
Un vocabulaire commun
C’est en toute logique que les deux univers possèdent un champ lexical assez proche. On parle ainsi couramment de « bad beat » lorsqu’une perte importante se fait sentir alors que la situation devait déboucher sur une réussite. Autre exemple parlant, celui du « swing », ce hasard inéluctable qui apparaît aussi bien lors de vos parties de poker que dans la progression d’un marché financier influé par des facteurs peu maitrisables.
Par moment, c’est même le poker qui influence directement le monde de la finance pour créer de nouveaux termes. Ainsi, « blue chip » que l’on traduirait par « jeton bleu », fait référence à des grandes entreprises (cotées en bourse) aux finances établies. En clair des sociétés qui ont les reins solides et qui ne subiront que très rarement les conséquences néfastes d’une crise économique.
Enfin, le dernier aspect sur lequel il faut insister est bien évidemment les personnalités qui composent ces deux secteurs. Car celles-ci se croisent souvent, que ce soit à une table de poker ou dans les sièges sociaux des plus grandes entreprises du monde. L’histoire du trader de Wall Street qui avait gagné plus de 2 millions de dollars lors d’un tournoi a fait le tour de monde.
Mais cela marche aussi dans l’autre sens. Les qualités possédées par les joueurs de poker sont souvent vues comme un critère déterminant pour les responsables du recrutement des plus grandes sociétés de la finance. L’une des plus grandes championnes de l’histoire a d’ailleurs troqué les cartes contre un très bon poste dans une société d’investissement basée dans le Connecticut. On ne compte plus le nombre de professionnels qui ont pu connaitre le succès dans leurs investissements financiers ou qui ont su lancer des startups lucratives ces dernières années.
De récentes études viennent également d’établir une corrélation entre la pratique du poker par les gérants de hedge fund (des fonds d’investissement qui appliquent des méthodes nouvelles de gestion de portefeuille) et leurs bonnes performances qui seraient un petit peu supérieures aux autres personnes qui ne jouent pas au poker.
Alors pour tous ceux qui ne se sont pas encore mis au Texas Hold’em et qui travaillent dans la finance, vous savez ce qu’il vous reste à faire !